République Dominicaine: Réflexion sur une autre forme de colonisation d’Haïti pour éviter le pire
Santo Domingo, RD, samedi 15 juin 2019
Par Hugo Guiliani Cury, Économiste
Haïti est classé parmi les dix premiers États défaillants du monde. Avant son indépendance, la colonie française de Saint-Domingue était la plus prospère de l’empire français. Il y a 204 ans, l’indépendance de la France est devenue la nation la plus pauvre de l’hémisphère occidental.
C’est la triste réalité du pays qui a aboli pour la première fois l’esclavage dans le monde et le deuxième du continent américain à atteindre son indépendance. Dans la recherche de solutions pour cette nation, la communauté internationale a essayé pendant des années d’exporter le modèle démocratique. Des élections ont eu lieu et des gouvernements ont été élus, mais en réalité, rien de tout cela n’a fonctionné là-bas. Cela est dû au fait que les institutions qui gèrent un régime démocratique ne sont pas présentes.
Mais la communauté internationale n’a pas voulu reconnaître cette situation.
Même après l’expérience après le séisme, ils ont dépensé des milliards de dollars des pays donateurs. Ces ressources auraient été affectées à l’aide humanitaire, aux dépenses militaires et à l’organisation d’élections. Mais rien n’a été réalisé et Haïti est pire qu’à cette époque.
Dans un cas comme Haïti, qui est clairement un État défaillant, la meilleure chose à faire aurait été d’établir un “protectorat“, mais l’article 78 de la Charte des Nations Unies, chapitre XII, indique qu’il n’est pas possible de le faire sur des territoires acquis la qualité des membres de cette organisation et c’est le cas d’Haïti. Comment alors concilier cette situation avec la réalité de cette nation?
Pour cela, il est nécessaire de rechercher d’autres mécanismes permettant de maintenir une valeur immuable en tant que principe de souveraineté. Mais en même temps, cela ne constitue pas un obstacle insurmontable à l’existence même d’Haïti en tant que nation et à ce qu’elle puisse devenir une nation viable.
À l’heure actuelle, et dans de tels cas, l’ONU a préféré appuyer le concept de souveraineté conventionnelle. Cette pensée et son application ont été négatives dans les soi-disant “États défaillants”. C’est pourquoi, dans certains cas, d’autres options ont été proposées pour rendre l’aide internationale plus efficace. Nous pensons qu’une alternative à cela est l’application du concept de “Souveraineté partagée” en vertu duquel une sorte de partenariat serait instauré entre les parties et dans lequel les autorités locales accordent le pouvoir, en l’occurrence à la communauté internationale, de traiter certains problèmes. régions d’Haïti pour une période définie.
Cette option permettrait de parvenir à un accord en vertu duquel la communauté internationale peut appliquer un système similaire à ce qui serait réalisé avec un protectorat, mais dont la modalité et la dénomination seraient différentes de celles du protectorat. Cela s’appellerait “Alliance stratégique”, ce qui implique de faire un gouvernement partagé en Haïti avec la communauté internationale. Dans un tel schéma, un accord international serait conclu dans lequel Haïti déléguerait à la Communauté économique internationale la gestion et le contrôle de l’économie pendant une quinzaine d’années.
Cependant, l’autre partie, Haïti, régirait et gèrerait d’autres pouvoirs et domaines qui constituent normalement un État indépendant. Ces gouvernements seraient élus lors d’élections libres et conformément à la Constitution haïtienne. Les fonctions du secteur gouvernemental qui seraient assumées par les Haïtiens seraient tous les secteurs, sauf la zone économique.
Au final, il s’agit d’une sorte d’alliance stratégique, dans le cadre de laquelle les pouvoirs seraient partagés entre les deux parties. Il existe des précédents de ce concept et selon les expériences acquises, il est viable tant qu’il existe un équilibre entre les parties, c’est-à-dire les acteurs internes que sont les Haïtiens et les acteurs externes représentés par la communauté internationale.
Avec un tel pacte, la Communauté économique internationale se chargerait de l’exécution du processus de reconstruction économique d’Haïti et créerait une Agence de développement chargée de toutes les fonctions économiques. Ceci, à son tour, coordonnerait ces activités avec le FMI, la BID, l’OEA et la Banque mondiale.
Cette agence devrait être autonome et sa principale attribution serait de concevoir et d’exécuter le programme de reconstruction d’Haïti. Sa principale source de financement serait les dons du groupe de pays donateurs, ainsi que les fonds prêtés et provenant d’organisations internationales.
Alors que ses principales fonctions seraient: 1- Établir des priorités économiques. 2- Concevoir le programme de reconstruction. 3- Soumettez et supervisez les travaux à exécuter dans le cadre de ce programme. 4- Recevoir les ressources et les prêts donnés pour effectuer les décaissements conformément aux engagements pris. 5- Superviser et superviser l’exécution des travaux sous-traités conformément au calendrier d’exécution.
Dans la phase initiale du programme qui sera exécuté par l’Agence de développement, l’accent serait mis sur la création des infrastructures dont Haïti a besoin pour sa croissance économique dans des domaines tels que les routes hospitalières, les écoles techniques, les aqueducs et l’énergie. Un programme de ce type pourrait nécessiter environ dix milliards de dollars au cours de la première phase, soit cinq ans. Après quinze ans et dans le cadre d’un programme comme celui qui a été indiqué, Haïti aura consolidé les fondements de son développement économique et social, tout en créant les institutions nécessaires à la viabilité de la démocratie.
C’est à partir de ce moment-là qu’Haïti deviendrait un État-nation capable de fonctionner sous un régime démocratique, sans intervention extérieure. Nous, Dominicains, qui sommes sur la même île et dont le niveau de développement est beaucoup plus élevé, nous devons être les promoteurs de cette initiative. Il n’est pas nécessaire d’abonder à ce stade. Qui ne veut pas comprendre que si la situation haïtienne continue telle qu’elle est actuellement, il faudra quelques années à la République dominicaine pour devenir un État en faillite avec des millions d’Haïtiens sur son territoire, la solution sera alors de fusionner les deux Nations
Actuellement, nous avons la possibilité de faire partie du club exclusif qu’est le Conseil de sécurité des Nations Unies. Cela nous donne l’occasion d’être très proches des pays les plus puissants du monde. C’est cet instrument que nous devons utiliser pour tenter d’influencer et de convaincre quatre de ces nations (États-Unis, Russie, Chine et Angleterre) de la nécessité d’aider Haïti et d’adopter un système viable comme celui proposé ici. La réalité est que, dans le cas haïtien, si nous savons comment le présenter et le faire pression, la Communauté économique internationale ne peut pas continuer à éviter de prendre un engagement politique et économique à long terme avec ce pays. La position que nous avons aujourd’hui au Conseil de sécurité des Nations Unies doit être saisie. C’est en synthèse.
Hugo Guiliani Cury, auteurListin Diario